• La Fourrure

     

     

    Je hume en frémissant la tiédeur animale

    D'une fourrure aux bleus d'argent, aux bleus d'opale;

    J'en goûte le parfum plus fort qu'une saveur,

    Plus large qu'une voix de rut et de blasphème,

    Et je respire, avec une égale ferveur,

    La Femme que je crains et les Fauves que j'aime.

     

    Mes mains de volupté glissent, en un frisson,

    Sur la douceur de la Fourrure, et le soupçon

    De la bête traquée aiguise ma prunelle.

    Mon rêve septentrional cherche les cieux

    Dont la frigidité m'attire et me rappelle,

    Et la forêt où dort la neige des adieux.

     

    Car je suis de ceux-là que la froideur enivre.

    Mon enfance riait aux lumières du givre.

    Je triomphe dans l'air, j'exulte dans le vent,

    Et j'aime à contempler l'ouragan face à face.

    Je suis la fille du Nord et des Neiges, - souvent

    J'ai rêve de dormir sous un linceul de glace.

     

    Ah! la Fourrure où se complaît ta nudité,

    Où s'exaspérera mon désir irrité! -

    De ta chair qui détend ses impudeurs meurtries

    Montent obscurément les chaudes trahisons,

    Et mon âme d'hiver aux graves rêveries

    S'abîme dans l'odeur perfide des Toisons.

     

    Renée Vivien


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