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Par LLA le 7 Novembre 2013 à 08:00
Les algues entr'ouvraient leurs âpres cassolettes
D'où montait une odeur de phosphore et de sel,
Et, jetant leurs reflets empourprés vers le ciel,
Semblaient, au fond des eaux, un lit de violettes.
La blancheur d'un essor palpitant de mouettes
Mêlait au frais nuage un frisson fraternel;
Les vagues prolongeaient leur rêve et leur appel
Vers l'angoisse de l'air et ses langueurs muettes.
Les flots très purs brillaient d'un reflet de miroir...
La sirène aux cheveux rouges comme le soir
Chantait la volupté d'une mort amoureuse.
Dans la nuit, sanglotait et s'agitait encor
Un soupir de la vie inquiète et fiévreuse...
Les étoiles pleuraient de longues larmes d'or.
Renée Vivien
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Par LLA le 7 Novembre 2013 à 08:03
Il se fait tard... tu vas dormir,
Les paupières déjà mi-closes.
Au fond de l'ombre on sent frémir
L'agonie ardente des roses.
Car la Déesse du Sommeil,
De ses mains lentes, fait éclore
Des fleurs qui craignent le soleil
Et qui meurent avant l'aurore.
Renée Vivien
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Par LLA le 7 Novembre 2013 à 08:05
Tes cheveux aux blonds verts s'imprègnent d'émeraude
Sous le ciel pareil aux feuillages clairs.
L'odeur des pavots se répand et rôde
Ainsi qu'un soupir mourant dans les airs.
Les yeux attachés sur ton fin sourire,
J'admire son art et sa cruauté,
Mais la vision des ans me déchire,
Et, prophétiquement, je pleure ta beauté!
Puisque telle est la loi lamentable et stupide,
Tu te flétriras un jour, ah! mon lys!
Et le déshonneur public de la ride
Marquera ton front de ce mot: Jadis!
Tes pas oublieront ce rythme de l'onde;
Ta chair sans désir, tes membres perclus
Ne frémiront plus dans l'ardeur profonde:
L'amour désenchanté ne te connaîtra plus.
Ton sein ne battra plus comme l'essor de l'aile
Sous l'oppression du coeur généreux,
Et tu fuiras l'heure exquise et cruelle
Où l'ombre pâlit le front des heureux.
Ton sommeil craindra l'aurore où persiste
Le dernier rayon des derniers flambeaux:
Ton âme de vierge amoureuse et triste
S'éteindra dans tes yeux plus froids que les tombeaux.
Renée Vivien
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Par LLA le 7 Novembre 2013 à 08:08
Elle est lasse, après tant d'épuisantes luxures.
Le parfum émané de ses membres meurtris
Est plein du souvenir des lentes meurtrissures.
La débauche a creusé ses yeux bleus assombris.
Et la fièvre des nuits avidement rêvées
Rend plus pâles encor ses pâles cheveux blonds.
Ses attitudes ont des langueurs énervées.
Mais voici que l'Amante aux cruels ongles longs
Soudain la ressaisit, et l'étreint, et l'embrasse
D'une ardeur si sauvage et si douce à la fois,
Que le beau corps brisé s'offre, en demandant grâce,
Dans un râle d'amour, de désirs et d'effrois.
Et le sanglot qui monte avec monotonie,
S'exaspérant enfin de trop de volupté,
Hurle comme l'on hurle aux moments d'agonie,
Sans espoir d'attendrir l'immense surdité.
Puis, l'atroce silence, et l'horreur qu'il apporte,
Le brusque étouffement de la plaintive voix,
Et sur le cou, pareil à quelque tige morte,
Blêmit la marque verte et sinistre des doigts.
Renée Vivien
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Par LLA le 7 Novembre 2013 à 08:11
La mer murmure une musique
Aux gémissements continus;
Le sable met, sous les pieds nus,
Son tapis de velours magique.
Et les algues, soeurs des coraux,
Semblent, à demi découvertes,
D'étranges chevelures vertes
De sirènes au fond des eaux.
Le vent rude des mers rugueuses
Ne souffle point la guérison...
Ah! le parfum... ah! le poison
De tes lèvres, fleurs vénéneuses!
Tu viens troubler les fiers desseins
Par des effluves de caresses
Et l'enchevêtrement des tresses
Sur les frissons ailés des seins.
Ta beauté veut l'attrait factice
Des attitudes et du fard:
Tes yeux recèlent le regard
De l'éternelle Tentatrice.
Renée Vivien
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