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Par LLA le 4 Avril 2014 à 15:16
Excellente Prométhée, il y a aussi des
humains qui t'égalent en habilité: qui que
ce soit qui véritablement ait dessiné cette
vierge, si l'on eût ajouté aussi la voix,
c'était Agatharchis tout entière.
Celle qui grava ces paupières décloses
Ainsi que des fleurs, ces beaux doigts sans anneau,
Ce corps puéril, plus tendre que les roses,
Plus souple que l'eau,
Eût-elle ajouté la voix qui sollicite
Et qui persuade, ainsi que le paktis,
Elle eût évoqué la splendeur d'Aphrodite
Et d'Agatharchis.
Renée Vivien
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Par LLA le 4 Avril 2014 à 15:18
Vous qui parlez peu, femmes aux
cheveux blancs, vous, fleurs de la
vieillesse pour les mortels...
Femmes aux cheveux blancs que l'hiver caresse,
Vous que réjouit l'intimité du feu
Et du crépuscule, ô fleurs de la vieillesse,
Vous qui parlez peu,
Vous avez la paix candide des années,
Vous êtes le choeur des vivants souvenirs:
Douces, vous tressez les couronnes fanées
Des anciens désirs.
Vous vous attardez, comme autrefois, aux porches
Où Phoibos blondit la mousse et les lichens,
Et vous allumez en souriant les torches
Rouge des hymens.
Vous aimez l'automne aux yeux bruns et la rouille
Des ports où le vent laisse un parfum salin:
Vous filez, au chant de votre humble quenouille,
La neige du lin.
La vierge respecte et craint votre sagesse,
Et votre salut est lent comme un adieu,
Femmes aux cheveux blancs, fleurs de la vieillesse,
Vous qui parlez peu...
Renée Vivien
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Par LLA le 4 Avril 2014 à 15:20
De ce côté, le vain écho traverse à la nage
(le fleuve) vers l'Hadès; le silence (demeure)
chez les morts, et l'ombre s'empare des yeux.
Le vain écho nage aveuglément vers l'ombre
Où les plus beaux choeurs ne sont qu'un remous bref,
Où le souvenir le plus cher plonge et sombre
Ainsi qu'une nef.
Lasse, la pleureuse, ivre de somnolence,
Auprès d'une stèle épuise ses transports:
La cruche de deuil est vide, et le silence
Règne chez les morts.
La myrrhe, fumant dans l'or des cassolettes,
Ne réjouit plus les jardins d'aloès;
Les vierges sans voix tressent les violettes
Blanches de l'Hadès.
Les baromos se sont tus sous les acanthes...
Rouillés et pareils à des miroirs ternis,
Les flots du Léthé reflètent les Amantes
Aux bras désunis.
Perséphoné tisse en des trames funèbres
Les fils brisés des espoirs et des adieux.
Elle seule veille et songe, et les ténèbres
S'emparent des yeux.
Renée Vivien
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Par LLA le 4 Avril 2014 à 15:23
Doux fut ce labeur d'Erinna...
Le couchant rougit, de son faste
Cruel, ton bleu péplos,
Qui, dans ses plis, a l'ampleur chaste
Et simple du Paros,
Et tes cheveux de Néréide,
Dont Psappha chantait l'or fluide,
Tremblent sous le vent qui les ride,
Eranna de Télos.
Les nefs aux frissons de fantômes
Dardent leurs mâts pointus;
Les aromates et les baumes
Concentrent leurs vertus;
Tandis que s'empourpre la plaine,
Pâle, tu suspends ton haleine,
Et tes yeux cherchent Mytilène
Dont les choeurs se sont tus.
Au delà des rouges collines
S'irisent les embruns:
Tu souris aux mains enfantines
Que baignent les parfums,
Aux mains qui, par les soirs d'opales,
Gravaient ces lettres musicales,
Gazouillant comme les cigales
Ivres de verts parfums.
Les pipeaux qu'un satyre affûte
S'argentent, et le bruit
D'eaux et de feuilles de la flûte
Susurre et coule et fuit.
Ton âme d'amoureuse écoute
Les voix errantes sur la route,
Et, prophétique, elle redoute
L'approche de la nuit.
Renée Vivien
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Par LLA le 4 Avril 2014 à 15:25
Cependant elle n'est point perdue pour
la mémoire des hommes, ni cachée sous
l'aile ombreuse de la nuit noire.
L'heure est ardente et solennelle,
Et Psappha, se penchant
Vers Eranna, pleure comme elle
L'Adonis du couchant.
Parmi l'éclair des bandelettes
Et les tiédeurs des cassolettes,
La Tisseuse de Violettes
Trame les fleurs du chant.
Au lointain, l'aimable hirondelle
Pointe et darde son vol,
Et les prés ont la sauterelle
Pour humble rossignol.
La vague meurt dans une étreinte;
Sur la montagne, l'hyacinthe
Ensanglante de pourpre éteinte
La matité du sol.
Psappha tourne vers sa disciple
Son regard vaste et doux,
Profond comme le soir multiple
Sur l'onde sans remous.
Elle parle, et l'ombre révère
La beauté de son front sévère:
Quelqu'un, dans l'avenir larvaire,
Se souviendra de nous.
Renée Vivien
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