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    Fille de l'Arès, Constance belle et rude,

    Tes yeux, où l'effroi du passé brûle encor,

    Sont pareils aux yeux noirs de la solitude

                    Sous ton réseau d'or.

     

    Dans un ciel massif tu demeures, mortelle,

    L'Infini dans tes regards extasiés,

    Que Sélanna règne ou que Phoibos attelle

                    Ses fougueux coursiers.

     

    Un pâle troupeau d'âmes crépusculaires,

    Réprimant les pleurs et les lâches sanglots,

    T'obéit, ô toi qui brise les colères

                    Lascives des flots.

     

    Tu vois sans terreur la tempête qui fume

    Et le sang futur empourprer le Levant,

    Toi qui sais dompter le tonnerre et l'écume

                    Et le cri du vent.

     

    Le Temps détruira les Dieux, mais le Temps même

    Ne changera pas ton sourire d'airain:

    Tu sais opposer à l'Ananké suprême

                    Ton mépris serein.

     

    O toi l'Invaincue, ô toi l'Inaccessible,

    Tes paupières ont le doux pli de la mort;

    Tu sembles rêver, telle en son lit paisible

                    La vierge qui dort.

     

    Tes tempes sans fleurs ont dédaigné la palme.

    Le couchant a moins de paix que ton orgueil,

    Et le rocher moins de grandeur et de calme

                    Que ton grave seuil.

     

    Semblable à la nuit où s'éteignent les flammes

    Et les roux éclairs de l'astre révolté,

    Enseigne aux héros l'endurance des femmes

                    Et leur loyauté.

     

    Renée Vivien


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    L'ombre bleuit les monts sacrés

      D'où Phoibé, lente, émerge.

    Ses rayons coulent sur les prés

      Comme l'eau sur la berge.

    Pareil aux Pommes d'Or, le fruit

    Du clair verger frissonne et luit;

    Damophyla parle à la nuit:

      "Je serai toujours vierge.

     

    "Psappha me brûle de ses yeux.

      Je toucherai, comme elle,

    De mes bras étendus, les cieux

      Que l'or des nuits constelle.

    Je verrai l'avant des vaisseaux

    Sillonner la pourpre des eaux,

    Et les Muses aux beaux travaux

      Me rendront Immortelle."

     

    Elle dit, le front détourné,

      Car l'être solitaire

    Garde en son coeur prédestiné

      Le songe et le mystère;

    L'herbe a des bleus froids de lapis

    Que percent des éclairs d'iris,

    Et, triomphante, l'Artémis

      Illumine la terre.

     

    Renée Vivien


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    Tissons l'hyacinthe et l'iris

      En des trames confuses;

    Je chanterai, sur le paktis,

      L'Aphrodite et ses ruses.

    Lève tes paupières sans fard

    D'où coule un limpide regard:

    Nous avons une bonne part

      Dans les présents des Muses.

     

    Ceins ton front chaste de lotos,

      Ainsi qu'une danseuse

    Tanagréenne au blanc péplos.

      De ta voix d'amoureuse

    Chante le mélos, de ta voix

    Défaillante comme autrefois...

    Divine écaille, sous nos doigts

      Deviens harmonieuse.

     

    Renée Vivien


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