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Par LLA le 4 Avril 2014 à 15:45
Etranger, si tu navigues vers Mytilène aux
beaux choeurs pour y cueillir la fleur des
grâces de Sappho, dis-lui qu'une femme de
Locres, chère aux Muses et à elle aussi,
enfanta d'autres (chants) pareils et que
mon nom est Nossis. Va.
Etrangère aux yeux noirs qui vas vers Mytilène
Où l'on cueille la fleur des grâces de Sappho,
Ecoute! je te parle et suis à bout d'haleine...
Lorsque tu reviendras, fidèle comme Echo,
Parle-nous de la ville indolemment couchée,
Telle une courtisane aux voiles de byssus,
Qui s'allonge sur la couche molle, jonchée
De roses, de fenouil, d'iris et de crocus.
Vierge, dis à Sappho qu'une femme répète
Les odes où s'attarde un sourire d'Atthis,
Qu'elle a chanté les vers du souverain Poète:
Etrangère, apprends-lui que mon nom est Nossis.
Dis-lui qu'en appelant sa caresse inconnue,
J'ai sangloté d'amour sous mes cheveux épars,
Que je la vois pareille à l'Aphrodite nue,
Dis-lui que je l'attends et que je l'aime... Pars!
Renée Vivien
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Par LLA le 4 Avril 2014 à 16:00
Rien n'est plus doux qu'Erôs, et tout
ce qui est heureux vient après. J'ai
craché de ma bouche même le miel.
Et voici ce que dit Nossis: Celle que
Kupris n'a point aimée ne sait pas
quelles fleurs sont les roses.
Vierges et femmes, rien n'est plus doux que l'amour.
Les Kharites aux bras blancs, et les jeunes Heures,
Les Piérides au front ardent comme le jour,
Et l'Aurore aux pieds nus, lui sont inférieures.
Je dédaigne le vin, je méprise le miel,
Je ne veux que le goût des baisers à ma bouche;
Ni les frissons de l'eau ni les remous du ciel
N'égalent l'ondoiement de ta chair sur ma couche.
Celle qui dédaigna le rire de Kupris
Et qui n'a point connu son lit de violettes
A le front gris des Morts. Ainsi parle Nossis
Dont l'Erôs enduisit de cire les tablettes.
Celle qui ne craint point à l'égal du trépas
Les aubes sans caresse et les nuits sans murmure,
O Déesse aux yeux bleus! celle-là ne sait pas
Quelles fleurs sont les roses de ta chevelure!
Renée Vivien
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Par LLA le 4 Avril 2014 à 16:02
Et, ayant ri aux éclats, tourne-toi vers
moi et dis-moi une parole amicale. Je suis
Rhinthon de Syracuse, chétif rossignol
des Muses, mais des bouffonneries
tragiques nous avons cueilli notre lierre
personnel.
J'ai ployé sous le poids accablant de la lyre,
Et j'ai pleuré jadis des vers sans lendemain:
Murmure une parole amicale, et d'un rire
Réjouis mon silence, et passe ton chemin.
Moi, qui fus un chétif rossignol des Piérides,
J'ai chanté le printemps au lumineux retour;
La lune me baigna de ses remous limpides,
J'ai vécu fervemment mes bleus minuits d'amour.
Je vis blondir Phoibé radieusement nue...
Aujourd'hui je sommeille aux pieds des aloès
Et des rudes cactus: et mon ombre inconnue
Erre dans la forêt muette de l'Hadès.
J'allumai pour l'hymen la torche qui flamboie,
Mes pampres ont orné le glorieux autel...
Un peu de cendre obscure... et pourtant de ma joie
Tragique je cueilli mon lierre personnel...
Renée Vivien
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Par LLA le 4 Avril 2014 à 16:05
Déesse vénérable, toi qui souvent
descendant du haut du ciel, contemples
le sanctuaire parfumé de Lacinium, reçoit
le vêtement du lin le plus fin que, avec son
illustre fille Nossis, tissa pour toi Theuphilis,
fille de Kléocha.
Bienheureuse Héra, la Très-Belle et l'Auguste,
Qui daignes contempler de tes regards puissants
Le glorieux naos que parfume l'encens,
Levant ton front d'ivoire où le béryl s'incruste,
Accepte en souriant cette robe de lin
Que les mains de Nossis tissèrent sous l'acanthe,
Nossis aux beaux sourcils, dont les cheveux d'amante
S'empourpre à l'égal du couchant et du vin.
Renée Vivien
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