• Sur un dauphin

     

                                Jamais plus, réjoui des ondes propres

                                à la navigation, je ne lancerai mon cou,

                                bondissant du fond de l'eau, ni je ne

                                soufflerai avec force de mes belles lèvres

                                le long des tolets du navire, charmé de mon

                                torse. Mais la fraîcheur empourprée de la

                                mer m'a poussé sur la terre ferme, et je

                                gis sur ce rivage délicat.

     

    Le souffle de la mer, adouci par le soir,

    Ne réjouira plus mes lèvres et mes joues,

    Et je ne verrai plus, le long des belles proues,

    Mon image, comme en le métal d'un miroir.

     

    Je ne monterai plus des profondeurs marines,

    Je ne m'ébrouerai plus au soleil du matin,

    Je ne me plairai plus au sourire enfantin

    De l'aurore, jouant avec ses cornalines.

     

    O passant, j'ai quitté le transparent émail

    Des flots, où le vent pleure en d'étranges syllabes,

    Où grouille obscurément la détresse des crabes,

    A travers le soir gris que bleuit le corail.

     

    Car le bondissement des courants implacables

    M'a jeté sur la rive aux longs varechs flottants.

    Voici la Mort au front paré d'algues, - j'attends,

    Hors d'haleine et couché sur le velours des sables.

     

    Renée Vivien


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